Cadran multiple en diptyque
Origine / signature : Hans TROSCHEL (Bamberg ? 1548 ou 1549 – Nuremberg, 1612).
Epoque : Daté 1595.
Matériau(x) : Ivoire à décor et inscriptions polychromes rouge, vert, bleu et or, verre et alliage de cuivre doré.
Dimensions : 13 (hauteur) x 62 (largeur) x 81 mm (profondeur).
Particularités : Rarissime cadran multiple en diptyque datant de la fin du XVIe siècle, dans un exceptionnel état de conservation.
Description : Le cadran en diptyque est composé de deux plaques d’ivoire réunies au moyen d’une charnière composée de cinq petits anneaux en alliage cuivreux. A l’avant du cadran, deux crochets pivotants permettent de maintenir le cadran fermé. De même, et symétriquement, à l’arrière du cadran, deux crochets identiques permettent de maintenir le cadran ouvert à 90 degrés, une fois les crochets rabattus sur deux petites pointes de métal.
Face 1a (Folio supérieur extérieur) : Cadran lunaire à inscriptions en latin, « Aetas Lunae – Horae Noctis » et décor d’étoiles stylisées, comprenant les quatre phases de la Lune (symbolisée les quatre fois par un visage inscrit dans un cercle) : « Das Erst Virtel », « Der Vol Mon », « Das Leczt Virtel » « Der Nev Mon ». Il se compose d’une part, au centre, d’une roue en cuivre doré, percée d’un oculus et dotée d’un indicateur en forme de main stylisée, et d’autre part, à l’extérieur de la roue, de deux cercles gravés sur l’ivoire de chiffres arabes en alternance de vert et de rouge. L’oculus de la roue permet d’indiquer visuellement les phases de la Lune en rouge sur fond bleu (le rouge est bien conservé, mais le bleu a partiellement disparu). La main stylisée pointe sur les heures de la journée (cercle intérieur gravé de deux séries de chiffres de 1 à 12), ainsi que sur les jours du mois (cercle extérieur gravé de chiffres de 1 à 29).
Une fois ouvert, les faces intérieures 1b et 2a font apparaître un double cadran solaire à fil axe ainsi que deux boussoles.
Face 1b (Folio supérieur intérieur) : Au sommet au centre, un cadran indiquant les mois de l’année surmonté d’un soleil (en partie effacé) et percé d’un trou en son centre. Cet orifice présente deux fonctions. D’une part, il permet de maintenir fermement le cadran lorsque celui-ci est fermé, en accueillant la petite pointe métallique située symétriquement en bas de la face intérieure du diptyque. D’autre part, il était possible de faire passer par ce trou une aiguille servant de gnomon. Les mois, accompagnés de leur symbole zodiacal correspondant, sont indiqués au moyen d’abréviations disposées en boustrophédon. A gauche, de haut en bas : de janvier à juin ; à droite, de bas en haut : de juillet à décembre. Les abréviations renvoient aux anciens noms allemands des mois :
IEN, pour Jenuar ou Januar (janvier) mois de Janus, dieu romain à deux visages opposés, l’un regardant vers l’avant (l’année à venir), l’autre vers l’arrière (l’année écoulée).
HOR , pour Hornung,( février), dont l’étymologie semble demeurée obscure.
MER, pour Merz ou März (mars), mois du dieu romain de la guerre et de la végétation.
APR, pour April (avril), dérivé du verbe latin aperire, ouvrir. Mois de l’ouverture, de l’épanouissement.
MAI, pour Mai (mai), dérivé de majus deus, autrement dit Jupiter, le plus important des dieux et dieu du printemps et de la croissance.
PRA, pour Prachet ou Brachet (juin), dont la racine étymologique est celle du verbe brechen, qui signifie coupure, séparation, cassure. Mois au terme duquel l’année se scinde en deux.
HEI, pour Heimond ou Heumond ou encore Heuert (juillet), mois des foins (Heusignifiant foin ou fané en allemand).
AVG, pour August (août), nom donné à ce mois en l’honneur de l’empereur romain Auguste en l’an 8 av. J.-C.
HERBST, pour Herbst (septembre) signifiant automne en allemand. Mois de l’automne.
WEIN, pour Wein (octobre)signifiant vin en allemand. Mois des vendanges.
WINT, pour Winter (novembre), signifiant hiver en allemand.
CRIS, pour Cristus ou Christus (décembre), mois de la naissance du Christ.
Sous ce calendrier mensuel, l’inscription suivante en alternance de rouge et vert : « QVANTI-/ TAS DIERVM*/ HANS TÖRSCHEL [sic]/ NORMBERGAE FA-/ CIEBAT AD POLI/ ELEVATIONEM 48*/ ANNO DOMINI 1595 ». Enfin, aux extrémités gauche et droite du folio, un orifice a été aménagé de manière à y glisser un fil-axe (remplacé, l’original ayant disparu). Sous cet orifice les indications suivantes : « HORAE POST MERIDIEM » (à gauche) et « HORAE A MERIDIE » (à droite). Au-dessus des orifices, dans les coins supérieurs, un petit motif ornemental composé d’un cercle orné symétriquement de quatre trèfles.
Face 2a (Folio inférieur intérieur) : Cette face présente deux boussoles, placées chacune en bordure d’un demi-cercle gravé. Toutes deux fonctionnent, protégées par un verre (fendu dans les deux cas) fixé au moyen d’un anneau en métal torsadé. Celle de gauche présente les indications « NORT », « OST », « SVD », « WEST », et le demi-cercle correspondant est indiqué comme étant celui de l’ « OCCIDENS », avec une suite de chiffres romains : XII, puis de I à VIII ; il est bordé à droite de l’inscription « HORAE POST MERIDEM ». La boussole de droite présente une rose des vents dorée, sans inscription. Le demi-cercle correspondant est celui de l’« ORIENS », avec une suite de chiffres romains de XII à IIII ; il est bordé à gauche de l’inscription « HORAE A MERIDE ».En haut, au centre, la mention « SEPTENTRION ». Symétriquement, en bas au centre : « MERIDIES ».
Sous cette dernière inscription, la mention « TEMPORI INSERVIENDVM » (au service du temps).
Face 2b (Folio inférieur extérieur) : Le revers du folio ne comporte qu’un symbole : un oiseau stylisé, une grive, symbole par lequel Hans Troschel avait coutume de signer ses œuvres (la grive se disant Drossel en allemand).
A propos de Hans Troschel. Hans Troschel (ou Tröschel, ou encore Droschel), est né en 1548 ou 1549, probablement à Bamberg. Il s’établit à Nuremberg assez rapidement et en devint citoyen en 1579. Hans Troschel est connu comme fabricant d’instruments scientifiques et en particulier de cadrans solaires à aiguille aimantée. Neuf de ses cadrans en ivoire sont recensés sur le site Epact, Scientific Instruments of Medieval and Renaissance Europe . Huit d’entre eux, datés de 1580 à 1618, sont conservés au Museum of History of Science d’Oxford. Le neuvième se trouve à l’Istituto e Museo di Storia della Scienza de Florence. Un dixième cadran diptyque est conservé au Musée international d’horlogerie de La Chaux-de-Fonds, en Suisse. Un onzième cadran de Hans Troschel est passé en vente le 7 décembre 2005 à Drouot-Richelieu chez Me Thierry de Maigret, numéro de lot 0259. Un douzième cadran de Troschel se trouve au Musée de la Renaissance à Ecouen. Enfin, on peut rapprocher ce cadran de celui de Paul Reinmann conservé au Musée du Louvre (numéro d’inventaire OA 10736), légué à ce musée par le célèbre antiquaire Nicolas Landau.
Signalons enfin que Hans Troschel eut un fils, également prénommé Hans (1585-1628), qui, après avoir exercé le métier de son père, apprit le métier de graveur sur cuivre auprès de Peter Isselburg (1580-1630).
Etat : Excellent état d e conservation de l’ensemble. L’ivoire n’est pas fendu. Il est légèrement jauni sur les parties extérieures, mais encore bien blanc sur les parties intérieures. La polychromie des inscriptions et des motifs gravés est bien conservée, malgré quelques légers effacements de couleur par endroits. Les verres des boussoles sont fendus. Aucun manque, mis à part les fils-axes d’origine.
Restaurations : Deux petites restaurations imperceptibles au niveau de deux crochets. Fils-axes en soie remplacés récemment.
Prix : Vendu.
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